« Mon cœur est là-bas » : au musée de l’immigration, les récits de l’Asie du Sud-Est s’entrechoquent

Direction la Porte Dorée en plein coeur du 12e arrondissement de Paris pour découvrir la nouvelle exposition du Musée national de l’histoire de l’immigration. Un parcours consacré aux mouvements migratoires d’Asie d’Est et du Sud-Est des années 1860 à aujourd’hui.

« Maman m’expliquait qu’elle mangeait ça sur le marché central le matin. Je ne l’ai jamais vu, mais je connais le goût. » A peine est-on rentré dans la première salle que les témoignages vidéos plongent les visiteurs dans le vif du sujet : celui de l’immigration asiatique vers la France. Au fil du parcours, les dates s’enchaînent sur les murs orange. L’occasion d’avoir une vue d’ensemble de l’histoire migratoire asiatique dans l’Hexagone. Certains panneaux, à droite d’un mur de portraits photo, donnent des chiffres importants. Par exemple, 6 % des personnes immigrées en France viennent de Chine, du Vietnam, du Japon, de la Corée, du Laos, de la Thaïlande et des Philippines.

Photographies exposées au Musée de l’histoire de l’immigration à Paris.

Ce parcours ludique et informatif permet de mettre en lumière « une part méconnue d’une histoire commune » entre l’Asie et la France. Face à la frise chronologique, une carte interactive retrace les différents mouvements migratoires des années 1860 à aujourd’hui sur tout le territoire français, mais aussi dans la capitale.

Même si j’habite ici, mon cœur est là-bas.

Seng Bougnaseng

À Paris, le 13e arrondissement est le quartier servant de lieu d’accueil pour les personnes venant d’Asie du Sud depuis les années 1975. Restaurants, boutiques, écoles de langues… Un véritable noyau asiatique où les associations fleurissent et où « la permanence des coutumes témoigne de l’ancrage territorial ». Aujourd’hui, ce quartier appelé Triangle de Choisy en raison de la forme des rues qui l’encadrent est le plus grand quartier asiatique de Paris et d’Europe. Dans la pièce étroite, de nombreuses photographies sont accrochées : elles illustrent toutes des rues, commerces et restaurants typiques du quartier.

Un quartier asiatique parisien

Photographies exposées au Musée de l’histoire de l’immigration à Paris.

L’histoire des « boat-people »

« C’était le bon vieux temps. » Dans la salle aux murs rouge, penchée sur les nombreux carnets de voyage, les yeux rivés sur les photographies, Seng Bougnaseng se remémore différents souvenirs avec sa belle famille. C’est à l’âge de 13 ans, en 1975, qu’elle arrive en France comme une « boat people ». Elle explique avoir fui la dictature communiste du Laos après avoir participé à la révolution. « C’est important que ce genre de musée puisse raconter notre histoire. Au Laos, elle a disparu » raconte la sexagénaire. « Même si j’habite ici, mon coeur est là-bas » explique-t-elle la voix tremblante.

Une de Libération affichée au Musée de l’histoire de l’immigration à Paris.

Quelques couloirs plus loin, un extrait du journal télévisé de TF1 des années 1978 tourne en boucle. Les visiteurs apprennent le concept des « boat people », ces réfugiés asiatiques qui cherchaient à fuir les régimes communistes. À droite de l’écran, des photographies signées Michel Setboun illustrent cette période. Tout comme la Une du journal Libération qui titrait en 1979 : « Les boat-people rejetés à la mer ». Une exposition qui permet de comprendre l’histoire de ces immigrés asiatiques en France.

Infos pratiques : Exposition Immigration Est et Sud-Est asiatique depuis 1860, Musée de l’histoire de l’immigration, Palais de la Porte Dorée, 293 avenue Daumesnil, 75012 Paris. Tarif à partir de 10 euros. www.histoire-immigration.fr

© Morgane Furon

Auteur/Autrice